Contre la loi Sécurité Globale !
Contre le projet de loi « confortant les principes républicains » dite « loi contre le séparatisme » !
Contre les inégalités dans les quartiers !

Depuis le 28 novembre, des milliers de personnes se rassemblent dans les rues contre la loi « sécurité globale ». Nous habitant·es des quartiers populaires, militant·es, collectifs, associations, nous étions dans les rues, partout en France pour dénoncer cette loi qui est une entrave à la liberté, une porte ouverte de plus pour que les violences policières s’accentuent et avec elles, le racisme et la stigmatisation toujours croissante et incessante des habitant·es des quartiers populaires.

Des associations et collectifs d’habitants des quartiers populaires ne cessent depuis des décennies de dénoncer les violences policières, les discriminations et stigmatisations, ainsi que les inégalités sociales dont ils sont les premières victimes : depuis la Marche pour l’égalité et contre le racisme en 1983 aux révoltes sociales de 2005 et aux Marches pour la Justice et la Dignité. Combien de manifestations faudra-t-il ? Combien de fois faudra-t-il, inlassablement, rappeler l’histoire de nos luttes qui n’ont eu de cesse d’interpeller des gouvernements qui ont successivement mis de l’huile sur le feu, attiser la haine et créer les conditions de la stigmatisation.

Cette loi, et son article 24, c’est la légalisation de tous les abus : ni filmé, ni vu, ni pris ! Ainsi, que vaudra la parole d’un·e jeune, d’un·e habitant·e des quartiers, d’un·e militant·e, d’un·e citoyen·ne engagé·e pour plus de justice sociale face à la parole de la police ?

Mais c’est aussi pour dénoncer un contexte global nauséabond que des milliers de personnes se rassemblent dans les rues. Nous appelons tous les citoyen·nes, collectifs et associations à se mobiliser contre la loi en préparation visant à « conforter les principes républicains » – dite loi « contre le séparatisme » – dont l’objet même fait l’amalgame entre pratique de la religion musulmane et apologie du terrorisme et dans laquelle le gouvernement pourrait replacer son article 24. Espérons que nous serons aussi nombreux·ses !

Les valeurs républicaines que nous défendons sont la liberté, l’égalité et la fraternité. Or ce projet de loi instrumentalise le principe de la laïcité au prétexte de lutter contre le terrorisme. Il bafoue nos valeurs et le principe d’indivisibilité en stigmatisant une partie de sa population.

Ainsi, nous refusons tout amalgame entre pratique de l’Islam et terrorisme. Nous refusons la banalisation des discours de l’extrême droite à laquelle ces projets de loi contribuent. Nous refusons que les personnes qui pratiquent la religion musulmane et qui sont issues de l’immigration, soient les boucs émissaires des difficultés vécues par nombre de leurs concitoyens, à moins qu’il ne s’agisse d’un cynisme politicien irresponsable jouant sur la politique de la tension et de la peur.

Enfin, ce que nous dénonçons ce sont aussi les effets de la crise sanitaire à l’échelle nationale, comme à l’échelle la plus locale. La crise sanitaire actuelle jette un éclairage cru et dramatique sur les inégalités et les a fait exploser : chômage massif, habitat dégradé et surpeuplé, conditions de vie et de travail exposant à l’épidémie, mise en échec scolaire.

Mais cette réalité n’est pas nouvelle, depuis plus de quarante ans, nous, habitant·es des quartiers populaires, nous faisons face à des politiques publiques qui ne font qu’aggraver les inégalités ; et nous n’avons eu de cesse d’interpeller.

Il y a quelques jours paraissait une tribune signée par 110 maires appelant à la solidarité et à l’aide pour les quartiers populaires. Certains d’entre eux sont à l’origine même des inégalités que nous dénonçons. Quand notre parole sera-t-elle donc légitime ? Quand notre parole aura-t-elle suffisamment de valeur pour peser dans le débat public ?

Pendant le premier confinement, alors que les pouvoirs publics étaient paralysés, ce sont les habitant·es et des associations des quartiers qui se sont mobilisés pour de multiples initiatives de solidarité et en premier lieu pour «s’alimenter». Celles-ci témoignent de la résistance d’un tissu associatif local pourtant soumis à rude épreuve, et de son ancrage au plus près des habitant·es. En 2013, à l’issue du rapport Bacqué et Mechmache, nous avions fait un certains nombres de propositions, produites par des habitant·es des quartiers, pour lutter contre les inégalités et pour plus de justice sociale.

Force est de constater, aujourd’hui encore, que les décisions continuent à se prendre sans les habitant·es. Les discours et mesures continuent à stigmatiser les quartiers populaires. La dérive sécuritaire et discriminatoire s’affirme jour après jour, alors que la question posée est certes de répondre à l’urgence mais aussi de construire une véritable politique qui s’attaque aux inégalités et qui soit construite avec les habitant·es de ces quartiers.

Dans cette période de crise, où se posent des questions urgentes et des enjeux fondamentaux pour une autre société, pour la place que doivent y prendre les classes populaires, des moyens sont essentiels. Il s’agit aussi de renverser les vieilles pratiques et pour une fois de construire avec les habitant·es une politique de transformation sociale.

Coordination nationale Pas sans Nous !

10 décembre 2020